Lorsqu’on met en vente son logement, on le fait mesurer et on fait parfois la découverte d’une mauvaise nouvelle : il est plus petit qu’on ne le pensait !
En tant que diagnostiqueurs immobiliers, il nous incombe malheureusement d’annoncer ce genre de mauvaise nouvelle de temps à autre. Et comme nous officions à Paris, une différence, même minime, prend des proportions importantes puisque « vous vous rendez compte, vu le prix du mètre carré à Paris, etc. ». Pour nos diagnostiqueurs, cela peut donc être un moment particulièrement désagréable d’avoir à expliquer à un propriétaire que son joli petit 3 pièces de 60 m² n’en fait en réalité que 53. C’est difficile à dire, on sent qu’on fait de la peine, on passe beaucoup de temps à détailler où sont les erreurs de la mesure qui annonçait 60, et on est en retard à son rendez-vous suivant.
Nous sommes donc en quelque sorte également victimes de ces mesures erronées, et sommes surtout conscients que cela constitue un très fort désagrément pour certains de nos clients. Nous avons réfléchi à une solution pour l’éviter et sommes arrivés à la conclusion que c’est possible grâce à la « Carrez contradictoire », concept que nous allons vous expliquer de ce pas.
Loi Carrez – La difficulté du recours
La législation prévoit aujourd’hui que, si vous avez acheté un bien dont la superficie Carrez avait été surestimée de plus de 5%, vous pouvez vous retourner contre le vendeur et obtenir une compensation pour ce que vous avez payé en trop. Nous avons déjà écrit un article sur les modalités de ces recours.
Il y a deux problèmes majeurs à cette possibilité de recours.
Le premier problème, c’est que parfois évidemment, votre appartement est 4% plus petit que vous ne le pensiez et pas 5%, c’est-à-dire que votre 50m² fait en réalité 48m², ce qui fait quand même 20 000 € (nota : article écrit début 2019, c’est peut-être devenu 15 000 €/m² à la date à laquelle vous le lisez) jetés par les fenêtres, mais vous nous ne pouvez vous retourner contre personne ni ne recourir à quoi que ce soit. Vous avez perdu 20 000 €. Même si on peut espérer que le législateur trouvera bientôt une solution à ce problème, ce n'est pas encore fait.
Le deuxième problème, c’est que vous n’avez qu’un an pour le faire après avoir acheté le logement en question. Or vous, comme moi et 100% des gens que je fréquente, ne mesurez pas la superficie des logements que vous occupez pour le plaisir et donc n’aurez pas l’occasion de vous rendre compte de vous-mêmes que oui, décidément, cet appartement est 6,5% plus petit que ce qu’on vous a dit. En réalité, le seul moment où vous referez mesurer la superficie de votre bien, c’est au moment de le revendre, et c’est souvent beaucoup plus d’un an après. Il est alors trop tard pour tout recours, il est même parfois trop tard pour enguirlander le diagnostiqueur immobilier indélicat qui avait fait la précédente mesure, puisque son entreprise aura vraisemblablement disparu sous les coups de multiples recours, comme le laissait présager son peu de professionnalisme.
Acquéreurs parisiens, faites faire une mesure loi Carrez contradictoire
Voici la solution qui va régler ce problème : la Carrez contradictoire (dénomination inventée par nous-mêmes, pas peu fiers).
Il s’agit de faire réaliser une mesure de la superficie Carrez d’un bien immobilier que vous allez acheter, c’est-à-dire de savoir à quoi vous en tenir avant d’alléger sensiblement votre épargne et de vous endetter sur 30 ans. Juste après avoir signé un compromis de vente, et avant la fin de votre délai de rétractation de 10 jours, faites, à vos frais, passer un deuxième diagnostiqueur immobilier pour mesurer l’objet de vos désirs. C’est vous qui avez choisi ce professionnel, vous êtes donc certain qu’il n’aura pas reçu de petit billet ou même de forte incitation à surestimer la surface. A Paris, où les appartements sont très chers et les diagnostics très peu chers, vous vous en tirerez entre 100 et 300 € alors que vous venez de vous engager à en dépenser plusieurs centaines de milliers ! C’est donc presque rien, et vous saurez immédiatement si on s’apprêtait à vous flouer un peu, beaucoup, à la folie ou pas du tout.
Si la surface est identique, continuez comme si de rien n’était.
Si la surface est plus importante que ce qu’on vous avait annoncé (ça arrive aussi, évidemment), continuez également comme si de rien n’était. Ou bien faites preuve d’imagination, expliquez par exemple que vous avez annulé au dernier moment ce rendez-vous de Carrez contradictoire car cela vous paraissait cher pour pas grand-chose…
Si la surface est inférieure, rétractez-vous du compromis, présentez le résultat au vendeur et rediscutez ensemble du prix du logement. Ici je vais tout de même glisser une petite remarque personnelle, sur laquelle je pense que l’ensemble des professionnels du diagnostic immobilier me rejoindront : si le résultat de cette Carrez contradictoire est 45,97 m² alors que le premier résultat était de 46,02 m², ce n’est pas inférieur, c’est identique ! Nous pouvons comprendre qu’à première vue on dirait que c’est un petit moins que 46 au lieu d’un peu plus de 46, mais en réalité c’est simplement 46 dans les deux cas.
Les avantages de la mesure loi Carrez contradictoire
La généralisation du recours à une mesure Carrez contradictoire par les acquéreurs aurait un certain nombre d’avantages. Pour vous acquéreurs, ils seraient les suivants :
- Avant l’achat, vous aurez peut-être la bonne surprise de pouvoir réclamer un rabais pour un appartement dont le prix vous donnait déjà satisfaction
- Au moment de l’achat, vous serez certains de ce qu’on vous vend
- Au moment de la revente, des années plus tard, vous n’aurez pas de grosse déception sur la valeur de votre bien
Pour nous diagnostiqueurs immobiliers, les avantages seront :
- Nous aurons moins souvent à annoncer de mauvaises nouvelles
- Nos « confrères » filous qui acceptent de surestimer des superficies Carrez en seront dissuadés car ils se sentiront contrôlés, ce qui nous arrangerait beaucoup
- Et évidemment, il y aura un peu plus de commandes de mesurages Carrez
Pour conclure, on ne peut vraiment pas dire que faire faire une Carrez contradictoire soit une habitude des acquéreurs, car sur plusieurs milliers de diagnostics immobiliers réalisés à Paris ces dernières années, nous avons effectué moins de 10 interventions de ce type. Elles ont toutefois toutes eu lieu lors des 12 derniers mois, c’est donc peut-être le signe de la naissance d’une tendance !
Régis Andrieux Foundateur de Monser
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